Astillas Del Molosse

Astillas Del Molosse Dogue de Majorque

Dogue de Majorque

Les origines

Les origines

 

Les Origines du Ca de Bou




Par Sergio GUAL Vice président du Club Espagnol




Eleveur et juge spécialisé du CDB






Traduction : Gérard Calendrin, juge de race




Les origines de la race sont très confuses, comme dans la majorité des races canines avec plusieurs siècles d’ancienneté.
Depuis que je me suis intéressé à la race il y a de nombreuses années, j’ai toujours entendu de la part des gens qui à ce moment étaient « éleveurs réputés », défendaient que les chiens qui étaient à l’origine étaient les bulldogs amenés par les Anglais lors que leur conquête de Minorque en 1708 approximativement.
Ces affirmations étaient énoncées sans la moindre étude sur ce thème, et le plus choquant, c’est qu’à côté de ces personnes sus-citées existaient (et existent) d’autres qui n’étant pas éleveurs de notre race, ont publié dans des périodiques locaux ou des livres canins, la sus-dite théorie, car il était important pour eux que leurs noms sortent dans tel ou tel article ou livre ou quelque investigation moyennement sérieuse sur la race.
A moi, personnellement, cette théorie paraît ridicule et totalement en dehors du contexte, surtout quand il existe des écrits décrivant à Majorque un chien de prise longtemps avant l’arrivée des Anglais.
S’il faut chercher une origine à notre ami, cela devrait être à partir des chiens de prises qui arrivèrent à Majorque en 1229 avec Don Jaime 1er le Conquérant, dans sa conquête de Majorque contre les Arabes.
Ces chiens étaient des chiens Alanos, similaires à ceux utilisés postérieurement dans la conquête de l’Amérique (comme les fameux Leoncillo et Berecillo), c’est à dire ceux mentionnés par le célèbre Ordre des Chevaliers de Malte. Sa mission devait être certainement d’ouvrir des brèches dans l’armée arabe, avec son énorme courage. Les chevaliers de cet Ordre étaient d’excellents soldats, attribuant à qui se distinguait au combat, le ruban nommé du « Lévrier Blanc ». Egalement ces chevaliers, dans l’île de Rhodes, avaient dans leurs bastions une compagnie de chiens de prise pour leur défense.
Postérieurement à la conquête de Majorque, cette population canine s’est installée, se croisant régulièrement entre eux et les chiens autochtones, formant un groupement de chiens de prise, dont l’utilisation basique fut le travail sur troupeaux bovins et comme garde des personnes et des biens.
La Confrérie des Bouchers ou Coupeurs utilise avec beaucoup de succès ces chiens depuis le XIIIème siècle








Son utilisation était au moins d’usage pour les bandits et voleurs de grands chemins, à cause de son parfait aspect intimidant et son caractère courageux. Déjà Don Joachin M. Bover décrivait dans sa « narration historique des évènements de Majorque » qu’en 1561 un groupe de 1700 Arabes attaquèrent et pillèrent la ville de Soller et ils furent mis en déroute par le Capitaine Angelats, aidés par les bandits résidant dans la ville qui se battirent héroïquement avec leurs fiers chiens de prise, lesquels causèrent de grands ravages parmi les Maures, ce qui valut ensuite à ces bandits le pardon royal. Ces chiens étaient appelés « chiens d’aide », qui étaient si fiers et sauvages qu’il était nécessaire de savoir qui les possédaient et combien ils en avaient, pour obliger à donner des aides à leurs maîtres (Histoire de Campanet, an 1573), comme à Christophe Bennasser de Santiani qui rendit compte de son chien bringé à museau obscur.
Avec le temps, cette population de chiens de prise a été croisée non seulement au gré des circonstances mais aussi de façon préméditée par les paysans aux autres chiens de garde et de berger insulaires, le ca de bestiar ou berger majorquin, en recherchant à améliorer la fonctionnalité pour ses diverses tâches.








Pour revenir à la fantasmagorique théorie de l’origine de notre ca de bou à travers les Bulldogs anglais, j’ai toujours pensé qu’à partir du moment où les Anglais se sont installés à Minorque, introduisant de grandes quantités de Bulldogs (chose très improbable) et les croisant avec les chiens de prise autochtones, comment le résultat de ces croisements aurait-il formé une population aussi importante dans l’île de Majorque, alors qu’à Minorque (lieu de conquête anglaise), il n’y avait pas le plus petit groupement ?
Comme on peut le voir, c’est une idée viable dans l’absolu, mais ce qui est très possible, c’est que les Anglais (comme cela s’est passé ensuite dans la péninsule avec les chiens de prise espagnols) ont importé des exemplaires de ca de bou en Angleterre, pour retremper le sang de leurs vieux bulldogs, vu l’extraordinaire caractère et courage de nos chiens. Mais cela s’est passé réellement, comment le démontrer ?
Jusqu’il y a peu, on ne trouvait pas de preuve pour une telle affirmation, mais notre adhérent et ami Felipe Rotger, a eu la grande chance de pouvoir localiser une information qui confirme pleinement ma théorie. En 1862, les Anglais J.F. Bateman et G. Hope présentaient un projet pour assécher une part de l’étang salé de Majorque (aujourd’hui converti en Parc National) avec un important et pharaonique plan d’ingénierie hydraulique, les terrains devenant ensuite propriété de la New Majorca Land Company dont le contrat comprenait l’assainissement de cette zone de paludisme et garantissait l’enrichissement des puits des potagers voisins. De 1862 à 1894 (c’est à dire 32 ans), les Anglais étaient présents dans une zone qui par hasard était le lieu très chaud de combats de chiens à Majorque.
Précisément aux dates déjà citées, c’était l’apogée des combats de chiens car les localités de l’étang salé (Mura, La Puebla, Campanet, Inca, etc) étaient celles dont sortaient les grands préparateurs de chiens et des sujets extraordinaires dont la réputation dépassait les frontières de notre pays et faisait venir ici parfois des Italiens et des Allemands, entre autres, pour acheter dans ces lieux de nombreux chiots, certainement bien payés.
Egalement à Alcudia, près de l’étang salé, se tenait le troupeau de taureaux de combat de Son San Marti, qui avait des ca de bou pour contrôler ses animaux.
Ensuite, les Anglais qui avaient déjà investi 17 millions de pesetas dans le projet décidèrent de le vendre à cause de son coût ruineux à des familles nobles majorquines, les Gual de Torrella, qui ont acheté les terrains pour seulement 250 000 pesetas.
Au vu de tout cela, il est beaucoup plus logique de penser que les Anglais qui travaillaient dans l’ancien projet auront eu le temps plus que suffisant pour se rendre compte de l’énorme potentiel de notre race et de l’exporter vers leur pays et non l’inverse.
Cela est sûrement en ces termes généraux l’origine de notre chien de prise, similaire à d’autres chiens de prise espagnols, qui avec les années se sont établis dans tout Majorque, chez tous, riches et pauvres, paysans et gens des ville, personnages illustres, artisans et surtout « beaux parleurs » qui composaient des odes en vers, enrubannant leurs exploits et prouesses.
Ce passé glorieux dans lequel on ne doit pas se tromper et inscrire les objectifs tracés actuellement par le Club Espagnol du Ca de Bou (CECB) est en marge pour donner à connaître notre race, et présenter notre fidèle ami comme un excellent chien équilibré, de bon caractère, surtout avec sa famille et un incomparable compagnon de jeux.